Le tic-tac d'une pendule

Dimanche dernier, j’ai emmené Marianne dans une maison à vendre dont j’avais préalablement dérobé la clé à l’agence. C’est une belle maison de la fin du dix-neuvième siècle, richement meublée, garnie d’objets anciens et précieux, mais assez austère. Avant de nous y rendre, durant le petit-déjeuner, j’avais prévenu Marianne qu’elle y passerait la journée seule, attachée nue sur une table. Un peu surprise, ma chérie m’a quand même dit: d’accord. Je lui ai demandé de rester nue, d’enfiler seulement des bas et un porte-jarretelles noirs, et de se couvrir seulement de son manteau pour la route. Nous partons tout de suite, lui ai-je dit. Et, de mon côté, je m’habillai de la même façon. 

La route effectuée, je garai ma voiture devant la maison. C’est une maison implantée au milieu d’un grand jardin tout entouré de grilles. J’ai ouvert un lourd portail métallique et, au bout d’une allée de gravier d’une dizaine de mètres, nous avons gravi un large perron cérémonieux, franchi la porte d’entrée, et, directement, sommes entrées dans le salon. Là, sans même lui proposer une visite de la maison, j’ai demandé à Marianne de retirer son manteau et de s’allonger sur une petite table en acajou aux quatre pieds tournés, recouverte d’un beau cuir rouge, sur lequel j’ai tout de suite disposé une grosse couverture repliée pour améliorer le confort de ma belle. Marianne, sans discuter ni dire un mot, s’y est installée, se prêtant tout à fait à son rôle de soumise. J’ai attaché ses poignets et ses chevilles aux quatre pieds de la table, et quand cela fut accompli, je lui ai dit que j’allais la laisser dans cette maison jusqu’à minuit. Elle ne put s’empêcher de me dire: oh, mon dieu, Ophélie! Mais elle n’ajouta rien. En guise d’au revoir, j’embrassai ses lèvres, et comme elle y mettait ardemment sa langue, je ne pus m’empêcher d’en faire autant, de malaxer ses seins et d’exciter son clitoris avec mes doigts. Consciente que la journée, dans la solitude de cette grande et triste maison bourgeoise allait être éprouvantable pour elle, je voulus la gratifier, alors je penchai ma poitrine sur son beau visage et lui donnai l’un après l’autre mes seins à téter, ce qu’elle fit avec une incroyable voracité. Quand je me retirai, elle s’inquiéta soudain et me demanda si quelqu’un pouvait venir. Je lui dis que je n’en avais pas la moindre idée et qu’elle le verrait bien. Là dessus, je m’en allai, l’abandonnant lâchement à sa terreur. Je l’entendis me dire encore: j’ai peur, Ophélie, j’ai peur. A ce moment-là, je revins sur mes pas et, pour réponse, introduisis doucement, mais profondément un godemichet dans sa chatte, en même temps que je pris conscience d’un tic-tac infernal. Je ne l’avais pas encore remarqué, mais il émanait d’une pendule qui se trouvait sur une cheminée de marbre blanc, entre deux énormes chandeliers de bronze. Revenant vers ma chérie, je l’encourageai. Je lui dis: sois forte. J’hésitai à lui mettre un bâillon-boule, estimant que cela ne serait pas nécessaire, qu’elle serait sage et ne crierait pas.

Dans la voiture, j’eus le cœur gros, une larme coula sur ma joue, très consciente que j’infligeais à mon amour une terrible punition, d’autant que j’en avais pris seule l’initiative, ce qui n’était pas mon habitude. Rose était absente, elle avait découché et dormi chez Agathe, sa skippeuse de Douarnenez. 

Je suis revenue à cinq reprises, retrouvant à chaque fois Marianne dans la position où je l’avais laissée, le godemichet toujours bien en place. La pendule m’accueillait de son tic-tac douloureux, et à chaque fois, je demandais à ma chérie comment elle allait. Elle me répondait, avec un sourire à fendre le cœur, que ça pouvait aller. A plusieurs reprises, elle m’a demandé d’aller aux toilettes, et je l’ai détachée. Elle en a profité pour se détendre un peu, marcher, puis je la rattachais. Je lui demandais si elle avait vu quelqu’un, elle me répondait toujours en secouant négativement sa tête. Mais elle me disait qu’à chacune de mes venues, elle était terriblement inquiète, ne sachant qui entrait dans la maison, ce qui la terrorisait.  A chaque venue, je laissais mon manteau à l’entrée du salon, et me retrouvais nue à ses côtés, simplement vêtue de mes escarpins, de mon porte-jarretelles et de mes bas noirs, prête à opérer comme une salope, à profiter de sa vulnérabilité qui m’excitait beaucoup. Une fois rattachée, je m’activais et ne perdais pas mon temps, je m’occupais d’elle, la caressais, la malaxais, lui donnais mes seins à sucer, suçais les siens, léchais son clitoris, lui donnais le mien, tout cela sur le mode de l’éternel retour. Mais je variais aussi les plaisirs, lui donnais de temps à autre du martinet, pas trop fort pour ne pas la marquer, prenais son vagin avec un gode-ceinture, faisais vibrer son clitoris avec un wand, fixais sur sa bouche un gode-bouche sur lequel je me pénétrais, lui mettais des pompes à tétons, aussi des pinces à tétons avec vibreurs, l’embrassais partout sur le corps, sur la bouche, mélangeant longuement nos langues et maintes fois murmurais à son oreille que je l’aimais comme une folle… Et pendant ce temps, elle restait stoïque, subissait, ne rétorquait rien, prenait si j’ose dire son mal en patience, mais aussi certainement son pied, car elle jouissait souvent très fort, haletait quand cela la prenait, et j’avais l’impression que les murs du salon tournaient et que j’étais complètement ivre ou folle.

La dernière fois, quand je revins, à minuit, elle se trouvait dans la plus complète obscurité, cernée par le tic-tac horrible de la pendule qui me sembla battre plus vite et de manière saccadée, et aussi plus métalliquement. Je retirai mon manteau et ne la détachai pas immédiatement, voulant profiter du noir pour la pénétrer une dernière fois, mais cette fois avec Union, un godemichet sans harnais qui la fit jouir intensément, et moi aussi, car j’avais placé dans son bulbe le petit vibrateur adéquat. Puis, je retirai Union et vins m’installer sur le gode-bouche que j’avais laissé sur elle intentionnellement depuis ma dernière visite, et la chevauchai comme une sorcière endiablée, m’agrippant à ses seins. J’eus un second orgasme, et demeurai inanimée sur elle pendant de longues minutes. Quand je revins à moi, je lui redis que je l’aimais, qu’elle était toute ma vie, qu’elle me rendait heureuse, qu’il fallait qu’elle me pardonne. Je remis de la lumière, la détachai aussitôt, et cherchai immédiatement son regard. Il était tendre, pétillant, elle ne m’en voulait pas du tout. Elle me dit, étirant ses bras et ses jambes, que la journée avait été dure, mais bonne, exceptionnelle, hors du commun, qu’elle avait eu beaucoup peur, mais aussi qu’elle avait beaucoup joui. C’était un ensemble hétéroclite, merveilleux, indescriptible, féérique, un cadeau fantastique. Merci, merci me dit-elle. En souriant, je lui tendis son manteau qu’elle enfila sans le refermer, et elle me remercia encore d’un baiser sur la joue, avec une expression gaie et ravie qu’elle arborait seulement dans les grandes occasions. Bras dessus bras dessous, nous sortîmes de la maison et entrâmes dans les bruits du soir, marchâmes sur le trottoir bien éclairé par de grands lampadaires, moi tenant au bout d’un bras le sac d’accessoires si utile à notre plaisir et à notre folie. Arrivées à la voiture, je déposai le sac dans le coffre, puis nous nous retournâmes vers la maison. Elle me fait peur, me dit-elle, on dirait une maison hantée, une espèce de grosse louve griffue, je ne sais pas, ou peut-être une maison où il s’est passé un crime… Elle est belle, pourtant, cette maison, mais partons, Ophélie, elle me fait trop peur! Je l’embrassai, empoignant facilement ses seins qui n’étaient, tout comme les miens, en rien dissimulés par son manteau, tandis qu’au loin, la silhouette ténébreuse d’un homme marchant lentement venait vers nous.

Ophélie Conan

Dans ce texte, publié par Ophélie Conan, dans son blog « Conan la barbare », le 5 juillet 2016, j’apparais comme une soumise consentante, ce que j’ai souvent été avec elle ou avec Rose, surtout avec Rose d’ailleurs, qui se montrait très active et très entreprenante en ce domaine, mais avec moins de raffinements.

Ophélie avait le goût de ce genre de fête érotique. Elle improvisait ou pouvait y réfléchir pendant des jours, repérant des lieux, se munissant du matériel et accessoires nécessaires. Elle gardait le secret et prévenait rarement. Pour mon supplice d’un jour « dans la maison hantée », maison qu’elle avait à vendre dans son agence, elle m’a seulement prévenue, le matin, au petit-déjeuner. J’y suis allée, obéissante et totalement confiante.

Je garde un souvenir étrange de cette expérience. D’une part parce que cette grande maison très bourgeoise était terrifiante, presqu' "hitchcockienne", mais surtout parce que ma présence, durant toute une journée, y était non seulement incongrue, mais totalement illégale. J’étais attachée totalement nue sur une table, et je redoutais l’arrivée des propriétaires ou de je ne sais quelle personne autorisée. En fait, je n’avais rien à craindre, Ophélie maîtrisait totalement la situation, mais je ne le savais pas, elle ne me l’a dit qu’après. À chaque fois qu’elle me rendait visite, j’entendais la clé dans la serrure, j’écoutais la lourde porte qui s’ouvrait, et j’étais morte de trouille. J’avais un godemiché entre les cuisses, et pendant tout un temps, un gode-bouche sur la bouche. Je n’en menais pas large. Et peu de temps après, pour varier les émotions, mon adorée me faisait jouir et me donnait d’incroyables orgasmes de salope.

À la fin de la journée, j’avais moins peur, je m’habituais. Je me souviens même, quand elle m’a définitivement détachée, avoir été très joyeuse et très heureuse, avec ce sentiment bizarre d’avoir passé une journée merveilleuse, sans doute parce que j’avais surmonté une journée de terreurs et de plaisirs intenses, comme un personnage de conte de fée, ou encore parce que j’avais miraculeusement échappé à la mort. En même temps, paradoxalement, Ophélie m’avait dit son amour avec des mots, ainsi qu’elle en avait l’habitude, mais, dans ce contexte terrifiant, ses mots avaient pris une charge cosmique, tragique, énigmatique, fantastiquement érotique.

Marianne


(Textes publié le 15 avril 2020 dans mon blog "Marianne a du chagrin")

Commentaires

  1. Marianne! Marianne! Ô Comme cela est beau! Comme cela est Pur!!!

    Cé bô comme l'Antique Tè!

    Oui, vraiment vos deux visions, vos deux récits, vos deux témoignages de Reines-Soeur-Fleurs-Déesses!
    J'ai tellement vécu cela, que cela vient de m'en donner la chair de poule, à te-vous lire alors que ma mémoire s'activait de ces situations borderline vécues avec mon Amie-Amour Céleste qui demandait, demandait et demandait encore... Et je réalise à l'usage de ton terme de " consentante" que oui, c'est souvent pour qui n'a jamais vécu la chose comme cela que cela peut "apparaître" de prime abord...
    Félicitations à Toi pour cette liberté acquise dans et par l'Amour, tu es Magnifique de cela et à te découvrir, j'en ressens beaucoup de respect et d'Amour, de Fierté aussi pour toi...
    Tu es un Ange dans le corps ce que que l'on pourrait dans certaines circonstances qualifier de Sainte Femme ou de Sorcière, tellement tu es Belle de ta personnalité...

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    Réponses
    1. Je garde un souvenir vraiment merveilleux de cette journée extraordinaire!

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