Folle

Je pense à toi, je ne pense qu’à toi, et je suis folle de toi, et je suis folle de tes yeux, folle de tes lèvres, folle de tes seins, folle de tes oreilles, folle du petit lobe malicieux de ton oreille droite, folle du petit lobe malicieux de ton oreille gauche, folle de ton front, de ton cou, de ta nuque, folle de tes mains, folle de tes fesses, je suis folle de tout ce que tu as bien voulu me donner de toi, folle de ce que tu me donneras peut-être encore un jour, une nuit, si tu le veux, si tu le désires, à l’aube dans la brume ou au crépuscule dans le métro, je suis folle de ton silence, de ton mutisme, et folle des mots que j’attends de toi comme des perles rares, comme des baisers lumineux, comme des lunes d’un autre monde, comme des soleils oranges d’Afrique, comme des éclairs bleus aussi féroces que les yeux d’un fauve, comme des gouttes de pluie vive que je voudrais boire et voudrais amasser pour qu’elles forment un immense océan de toi dans lequel je pourrai enfin me baigner, redevenir toute petite, fœtus, atome, néant, géante, je suis folle de ton infinie douceur, folle de tes caresses, folle de ta tendresse, folle de ton regard qui parfois me blesse, parfois exprime la détresse, folle de ta force et de ta faiblesse, folle de ta folie, de ta compréhension, de ta sagesse infinie et de tes illusions, folle de ta lucidité et de ton humilité, de ta gentillesse de fée et de ta perversité de Reine ou de Déesse antique. Je t’aime toi, unique et vraie, miraculeuse et incertaine, proche et lointaine, avec ta culpabilité de petite fille souveraine, et je pense à toi. Mais tu es partie.

Ophélie Conan

Poème en prose adressé à Amélie en 2010, quand celle-ci avait quitté Ophélie pour passer des vacances dans le Lot avec sa nouvelle amante Chloé. Moi, je venais de rencontrer Ophélie et elle me disait aussi qu’elle m’aimait, qu’elle était follement amoureuse de moi. En fait, Ophélie était capable d’aimer les deux, même les trois, si l’on compte Chloé (« Ma rencontre avec Ophélie« ). Aujourd’hui, j’ai compris qu’on pouvait déborder d’amour pour plusieurs personnes.


(Publié le 22 mai 2020, dans "Marianne a du chagrin".)

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