Ce que j'ai vécu

Ça n’a pas toujours été facile pour moi. J’ai eu l’impression, à un moment donné d’être une mère indigne qui abandonnait ses enfants, désertant son devoir pour vivre son seul plaisir égoïste, qui plus est, avec une autre femme (et même deux, puisque Rose n’était pas prévue au programme). Longtemps, je me suis sentie coupable et sans doute ai-je plus docilement que d’autres, accepté et enduré les flagellations et autres punitions diaboliques de Rose.

Aujourd’hui, je ne pense plus être coupable, mes enfants se débrouillent bien dans la vie, et m’aiment, c’est du moins ce qu’ils me disent. Je suis heureuse dans ma vie de « tribade », car j’aime vivre et baiser avec plusieurs autres femmes (c’est à dessein que j’emploie ce mot de « tribade »). Aujourd’hui, ma seule vraie douleur est d’avoir perdu un trésor en la personne d’Ophélie… Elle m’était si chère, si importante pour moi, que je dois la réinventer. Je ne regrette en rien le choix que j’ai fait en venant vivre avec elle à P.. Heureusement, aujourd’hui, j’ai toujours près de moi mes deux petites chéries que j’aime aussi beaucoup et qui m’adorent. Elles sont jeunes, et je suis très heureuse de les voir s’aimer, se câliner et se tripoter. Elles font vraiment honneur à la beauté et à l’élégance du saphisme. Ce sont de jolies gouines, de très belles lesbiennes.

C’est vrai que j’ai recherché mon plaisir de femme, au détriment de mon devoir de mère. J’en ai toujours eu conscience, et parfois encore, je n’en suis pas fière. Mes enfants seraient-ils devenus meilleurs si j’étais restée avec eux 24 heures sur 24? Beaucoup d’enfants tournent mal, même dans des foyers apparemment unis et sécures. Ophélie qui a élevé normalement ses deux enfants, qui s’est émancipée seulement quand ceux-ci étaient devenus majeurs, a été beaucoup critiquée par son fils qui, à la fin, sans doute sous l’emprise de sa concubine Léa, lui reprochait sa vie dissolue à P., avec nous. Pour l’instant, mes enfants ne me reprochent rien de ce genre, bien au contraire, ils m’admirent. C’est assez drôle. Ils connaissent pourtant ma vie dissolue, savent avec qui je vis, malgré un père qui, au fil des années, s’est mis à ternir mon image…

Ophélie me disait souvent que, plus des enfants sont heureux chez leurs parents, plus ils ont des reproches, devenus adultes, à leur faire. À l’inverse, plus des enfants souffrent d’une situation difficile chez leurs parents, plus ils ont tendance à minimiser les reproches, voire à les idéaliser plus tard. Je ne sais pas si cela se vérifie vraiment.

Bref, je ne regrette rien. Sans doute avais-je besoin de cette vie de tribade libertine.


(Dernier article publié le 31 mai 2020 sur mon ancien blog "Marianne a du chagrin", fermé par Wordpress.)

Commentaires

  1. Toute morale mis à part, on a toujours raison quand on est sincère.

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  2. Chère Marianne,
    C'était le dernier article que j'ai pu lire et tu avais émue la mère en moi qui se demande toujours si elle a bien agi. Si tes enfants t'aiment et t'admirent, que demander de plus? Ce ne dut pas toujours être facile et ton texte nous le fait sentir. Je t'embrasse. Elisabeth.

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    1. Sans doute, mais souvent, les choses ne sont pas si simples dans ma tête pleine de doutes... Merci Elisabeth.
      Je t'embrasse.

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    2. Chère Marianne,
      Tu as tant d'amour en toi que ceci se reçoit avec émotion. Tu nous offres cet amour, et tu fais revivre Ophélie. Je ne puis croire que l'égoïsme t'ait atteinte, même si les doutes persistent en toi. Je te connaissais par Ophélie sans mesurer la beauté de votre amour. Ophélie est devenue mon amie et tu la deviens à ton tour, même si tu as noté des différences en moi, puisque j'aime les hommes et n'ai jamais senti de désir pour une femme. Je suis sensible à la beauté des femmes par-delà la sculpture, sachant les voir dans les rues, et faire un clin d'oeil aux hommes qui les admirent. Une petite histoire drôle au sujet de ma fille sur ma photographie. Elle n'avait pas deux ans quand nous prîmes l'ascenseur en même temps qu'un allemand blond aux yeux bleus : " il est beau " commenta-t-elle en nous regardant cherchant une réponse confirmant son admiration, ce qui me valut un clin d'oeil de bel allemand. Elle garde une préférence pour les yeux bleus...

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    3. Tu es une femme libre avec un grand cœur, et je te remercie de ces propos qui me vont droit au cœur. Je t'embrasse Elisabeth.

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  3. J'aime votre échange. Votre bel échange.

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