La mort

C’était l’après-midi

Sa voix ruisselait comme une belle angine

Le vent tournoyait et passait en rafales

Et ses bras souples étaient pareils à des ciseaux


Avec de graves sourcils

Elle marchait d'un pas grave

Comme revenant docile

D’un très lointain exil

Mais sa démarche était fluide

C’était une femelle farouche

Avec une pivoine rouge dans sa bouche


Dans le jardin

Les arbres

Déjà tout vêtus de bourgeons roses

Jouaient au plus malin devant elle

Ainsi que devant les pissenlits

Nouvellement apparus


Et aux longs roseaux du fleuve

S’accordait la rhubarbe

Dont l’étreinte

Savait enlacer savamment

Son triste fantôme de douleur


Ses yeux étaient grands

Et bleus comme des lotus

Et ses cheveux frissonnaient vaillamment

En de savants réseaux


Des enfants jacassèrent soudain

Et demandèrent l’heure

Puis à boire de l’eau

Pour eux, elle sortit de son diurne évanouissement

Vida le fond des flots

Et traversa la nuit d’une agonie patiente

Ainsi que mille lieux dangereux

Peuplés d’extraordinaires lys d’eau


Un doigt sur sa mamelle dure

Visible sous sa robe transparente

Elle découvrit ses belles dents blanches

Dans un sourire qui s’effaça aussitôt

Et son regard

Comme un éclair déroba sa sveltesse


Son rire était pur

Ses caresses profondes

Mais ses froids baisers

Depuis toujours animent les tombes

Et se font donjon

Où l’on reste définitivement prisonnier.


Ophélie Conan

"Le miroir des étoiles"

Commentaires

  1. Je dois dire que, dans un premier temps, j'ai eu du mal à ouvrir ce texte, en voyant son titre.
    Je pensais à la VIE.
    Et puis, venant de toi, d'Ophélie, j'ai finalement fini par cliquer sur le bouton "LIRE LA SUITE".
    Et j'ai été , comme d'habitude, envoûté par la puissance des mots d'Ophélie.
    Ce mélange macabre, de vie et d'érotisme qui n'appartenait qu'à elle.

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    Réponses
    1. Merci Gil, ce que tu écris me touche.
      Ce texte d'Ophélie sur la mort me semblait bienvenu, un an après sa mort.
      Bravo pour ton courage!

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    2. Tu te moques de moi, là.
      ...Pour mon courage...

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    3. Non, je ne me moque pas, je sais que tu n'aimes pas les images macabres! C'est donc courageux d'avoir cliquer. Je t'embrasse, Gil.

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  2. Splendide poème où la mort se fait séduisante comme notre compagne qui est là au jour le jour, mais encore vivante, jouant avec des enfants, séduisant des passants au passage dans son mouvement, apparaissant et disparaissant, peut-être apprivoisée. Je la sens mouvement et compagne, comme notre ombre portée. Je me verrais alors en flammes orangées tandis que mon ombre scintille en dégradés de bleu.

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    1. Ophélie est certainement contente de savoir que son poème te plaît! BIsou, Elisabeth.

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