Le droniste


On a beau chercher, on ne voit pas.

On ne voit pas qui pourrait-être le droniste.

Bien sûr, on ne connaît pas tout le monde dans ce village.

Au café-épicerie, il y a des poivrots qui, d’après Olivier et Sacha, jasent sur notre compte.

Ils disent que nous sommes des pimbêches de la ville,

Et qu’ils nous baiseraient bien.

Que ça rabattrait notre caquet.

Ils ne disent pas que nous sommes des gouines. Quand même pas ça. Ils le disent peut-être à d'autres moments, quand ils ne sont pas au café.

Le cafetier les écoute, sans rien dire, mais il a l’air d’un vicelard, ce cafetier, un grand maigre un peu ténébreux, et ça pourrait bien être lui, le droniste.

Il y a aussi l’ancien boucher-charcutier à la retraite. Sa femme est morte d’un cancer, l’an dernier, et il vit avec son fils vieux-garçon, un peu à l’extérieur du village. Il se marre tout le temps quand on le rencontre, on ne sait pourquoi. Peut-être parce qu’il picole. Il était réputé pour son boudin. C'est suspect.

Il y a aussi le Bernard qui vit avec la Madeleine, une vieille à moitié délirante qui lui gueule dessus sans arrêt et le traite de vieux caïman. Il passe toutes ses journées tout seul à bosser dans son potager, mais il a les yeux qui lui sortent des orbites quand mes petites passent à vélo, à côté de son jardin, sur la route. Évidemment, elles ne s'arrêtent pas, elles ont peur, elles le saluent poliment et elles filent à toute allure. Joséphine, quand elle se rend chez Jeanne-Marie, s'arrête à sa barrière et elle bavarde avec lui. Elle dit qu'il est bavard et plutôt sympathique, malgré ses grimaces. Mais il radote.

Le droniste, c’est peut-être aussi un ado à qui ses parents ont offert un drone pour son anniversaire. Joli cadeau.

C’est peut-être Jeanne-Marie, la copine agricultrice de Joséphine, à qui cette dernière achète des œufs, des tomates et des haricots verts. Ou bien son fils célibataire qui l'aide à la ferme. Non, je rigole, ce n’est sûrement pas elle, ni non plus son fils célibataire. En fait, on ne sait pas, on ne sait toujours pas, on ne saura peut-être jamais qui est le droniste.


Marianne

 

Commentaires

  1. Attention de ne pas tomber dans la parano. En tout les portraits sont intéressants. Beau sujet pour un film, ou un roman.

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    1. Tu as raison, Stef, nous n'en sommes qu'au stade des interrogations!
      Marianne

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  2. Voilà une ambiance entre un scénario hitchcockien et une partie de Cluedo... 😎
    Qui est le coupable ? Le Colonel Moutarde ou Madame Perverse, heu... Pervenche ?

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    1. C'est vrai. Ça tombe mal, je n'aime pas trop les polards!
      Marianne

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  3. Deux observations :
    Je ne voudrais pas que la peur domine votre vie quotidienne.
    Je vous demande néanmoins d'être prudent. Si vous avez des amis de confiance à proximité, gardez l'œil ouvert.
    Je t'embrasse très fort.

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    1. Ne t'inquiète pas Giannis, ce n'est pas la panique, mais... nous ouvrons l'œil, et restons prudentes.
      Marianne

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  4. C'est fou cette histoire de drone de vous faire arriver à vous méfier de tout le monde, et de vous interroger sur chaque visage et comportement des gens du village.
    Oui, il ne faut pas tomber, comme dit Steph, dans la parano, même si je comprends que ça agace.
    Je pense, aussi, que le fait de manipuler ces engins reste plutôt, aux mains de personnes assez jeunes.

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    1. Nous en sommes toujours au même point, nous ne savons pas qui est le droniste. Tu as raison, il est probablement jeune. Il vient assez peu, et s'éloigne dès que nous le remarquons. Et puis, nous sommes moins souvent dehors...
      Marianne

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    2. J'ai oublié de te dire que j'ai aimé et même souri à la lecture de la description des gens du village. Je te l'ai déjà dit, tu peux écrire des bouquins quand tu veux, comme le faisait Ophélie, tu as le talent pour.

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    3. Ça va pour des textes courts, mais je n'ai pas la patience d'écrire des textes longs!
      Marianne

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    4. Pourtant, votre vie au presbytère a de quoi garnir des pages et des pages d'un livre érotique.

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    5. Assurément. Mais notre priorité est de vivre le plaisir. Et puis écrire suppose la solitude. Nous ne sommes presque jamais seules, il y en a toujours une pour venir exciter les autres...
      Marianne

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    6. Je comprends. Difficile d'écrire dans ces cas là. Dommage. J'ai vu quelques vidéos avec des femmes qui lisaient, cette fois, en se faisant dévorer leur intimité sous la table. Leurs réactions saccadées et amplifiées au fur et à mesure de la lecture était des plus excitantes.

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    7. Ecrire demande de la concentration!
      Marianne

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